Le calcul du CIMR
La taxation des revenus « non exceptionnels » sera neutralisée par le biais du crédit d’impôt modernisation du recouvrement (CIMR).
À partir de l’année prochaine, l’impôt sur le revenu des contribuables sera prélevé à la source, y compris pour les exploitants individuels et les dirigeants de société. Des contribuables qui paient, cette année, l’impôt sur les revenus de 2017 et qui paieront donc, à compter du 1er janvier 2019, l’impôt sur les revenus de 2019. Afin d’éviter qu’ils n’aient à payer deux impositions en 2019, l’une à la source sur les revenus de 2019 et l’autre, de façon habituelle, sur les revenus de 2018, il a été décidé de gommer l’imposition des revenus de 2018. C’est la raison pour laquelle on parle d’« année blanche ». Une terminologie quelque peu abusive, en réalité. En effet, seuls les revenus « non exceptionnels » verront leur taxation neutralisée par le biais d’un crédit d’impôt − le crédit d’impôt modernisation du recouvrement (CIMR).
Le système de l’année blanche est assez simple : l’impôt sera calculé sur l’intégralité des revenus de 2018, et le CIMR viendra neutraliser cette imposition à proportion de la fraction représentée par les revenus non exceptionnels sur le total des revenus de l’année.
Illustration : un dirigeant de société perçoit, en 2018, un salaire net imposable, après abattement de 10 %, de 80 000 € ainsi que des dividendes imposables, après abattement de 40 %, de 20 000 €. Les dividendes constituant un revenu exceptionnel pour l’application du CIMR. Le montant de l’impôt sur le revenu s’élève, pour la totalité des revenus de 2018, à 10 000 €.
Le CIMR est donc égal à 10 000 x [80 000/(80 000 + 20 000)] = 8 000 €.
Et l’impôt à payer restant dû s’établit à 10 000 – 8 000 = 2 000 €.
Les revenus non exceptionnels
Seuls les revenus non exceptionnels seront concernés par le CIMR.
Seuls les revenus relevant du prélèvement à la source bénéficient du CIMR. Sont concernés, en particulier, les salaires et les bénéfices professionnels. Mais encore faut-il qu’ils soient considérés comme non exceptionnels, c’est-à-dire comme des revenus courants.
À l’inverse, les revenus touchés de façon inhabituelle constituent des revenus exceptionnels. Concernant les salaires, on peut citer :
– les indemnités de rupture du contrat de travail (sauf, notamment, les indemnités de fin de CDD) ou de cessation des fonctions de dirigeant et de mandataire social ;
– les revenus qui correspondent, par leur date normale d’échéance, à une ou plusieurs années antérieures ou postérieures ;
– les primes de toute nature sans lien avec le contrat de travail ou le mandat social.
Par ailleurs, les revenus de capitaux mobiliers, les plus-values immobilières et les plus-values mobilières, exclus du prélèvement à la source, ne sont pas concernés par le CIMR et doivent donc être considérés comme des revenus exceptionnels.
Rappel : même si l’imposition des revenus de 2018 est susceptible d’être gommée en totalité par le CIMR, il n’en demeure pas moins que ces revenus devront faire l’objet d’une déclaration au printemps 2019.
Le cas particulier des dirigeants
Des règles particulières s’appliquent au titre de l’année blanche aux exploitants individuels et aux dirigeants de société.
Des règles particulières s’appliquent au titre de l’année blanche aux exploitants individuels, qu’ils soient imposés en BIC, BA ou BNC, au motif qu’ils pourraient majorer leur bénéfice 2018 (en reportant des charges, par exemple) et ainsi optimiser les effets du CIMR.
Pour eux, un contrôle pluriannuel des bénéfices sur 4 ans s’applique pour déterminer la fraction non exceptionnelle de leur bénéfice. Ainsi, deux cas peuvent se présenter :
– si leur bénéfice de 2018 est inférieur au bénéfice le plus élevé (et non à la moyenne) des 3 dernières années (2015-2016-2017), le CIMR gomme l’imposition de ce bénéfice ;
– si le bénéfice de 2018 est supérieur au bénéfice le plus élevé des 3 dernières années (2015-2016-2017), la partie excédentaire est considérée comme exceptionnelle et donc imposée.
Illustration : une exploitante dégage un BIC en 2015 de 80 000 €, en 2016 de 85 000 € et en 2017 de 75 000 €. Le bénéfice le plus élevé des 3 dernières années est donc de 85 000 €.
Le bénéfice de 2018 est de 100 000 €.
L’impôt sur le revenu s’élève pour le BIC 2018 à 27 300 €.
Le CIMR sera limité à (85 000/100 000) x 27 300 = 23 205 €.
En conséquence, l’exploitante paiera un impôt de 27 300 – 23 205 = 4 095 €, selon son taux moyen d’imposition.
Étant précisé qu’une deuxième chance de gommer leur impôt s’offrira à ces exploitants l’année suivante. Ainsi, lors de la déclaration en 2020 des revenus de 2019, deux cas pourront encore se présenter :
– si leur bénéfice de 2019 est supérieur ou égal au bénéfice de 2018, un complément de CIMR sera octroyé pour effacer totalement le surplus d’impôt qui aura été réglé en 2019 sur leur revenu de 2018 ;
– si leur bénéfice de 2019 est inférieur au bénéfice de 2018 mais supérieur au bénéfice le plus élevé de la période 2015 à 2017, un complément de CIMR sera octroyé pour effacer partiellement le surplus d’impôt qui aura été réglé en 2019 sur leur revenu de 2018.
Reprenons l’illustration précédente : l’exploitante, dont le bénéfice 2018 avait atteint 100 000 € et généré un impôt de 4 095 €, réalise en 2019 un BIC de 90 000 €.
Un CIMR est calculé sur ce bénéfice, de (90 000/100 000) x 27 300 = 24 570 €. Le CIMR complémentaire octroyé sera égal à la différence entre ce CIMR 2019 et le CIMR 2018, soit 24 570 – 23 205 = 1 365 €.
L’impôt dû sur 2018 s’élèvera finalement à 4 095 – 1 365 = 2 730 €.
En outre, lorsque le bénéfice 2019 est inférieur au bénéfice 2018, les exploitants pourront réclamer l’annulation de l’impôt restant dû en démontrant que le bénéfice 2018 résulte d’un « surcroît d’activité ».
Point très important : une règle similaire de contrôle pluriannuel s’applique aussi aux dirigeants disposant d’un pouvoir de décision dans la société qui les rémunère pour déterminer le caractère non exceptionnel de leurs salaires et de ceux des membres de leur famille salariés de cette même entreprise.
Madelin, Perp, réductions et crédits d’impôt
Les réductions et crédits d’impôt feront l’objet d’une restitution.
Le CIMR va en grande partie neutraliser l’effet fiscal de la déduction du revenu des primes ou cotisations des contrats Madelin et des Perp. Mais attention, l’absence de versement sur le contrat Madelin viendrait gonfler le résultat 2018, ce qui pourrait générer un complément de résultat, par rapport aux 3 années précédentes, qui ne serait pas couvert par le CIMR. En outre, il ne faut pas oublier que l’objet premier de ces contrats est de couvrir le dirigeant et sa famille.
De plus, afin d’inciter au versement sur les Perp, le législateur a prévu, lorsque le montant des cotisations versées en 2018 sera inférieur à celui versé en 2017 et en 2019, que le montant pris en compte pour l’imposition des revenus de 2019 soit égal à la moyenne des cotisations versées en 2018 et 2019 !
Quant aux versements divers ouvrant droit à réductions et crédits d’impôt, ils conservent toute leur efficacité puisque ces avantages fiscaux seront en principe restitués au contribuable en fin d’année suivante !
À savoir : l’administration fiscale dispose, en principe, de 3 ans pour contrôler les revenus déclarés par les contribuables. Exceptionnellement, ce délai est porté à 4 ans pour les revenus de l’année 2018. L’administration pourra donc vérifier votre situation fiscale 2018 jusqu’au 31 décembre 2022 (au lieu de 2021).