Lorsqu’une société n’est plus en mesure de régler ses dettes, autrement dit lorsqu’elle se trouve en état de cessation des paiements, elle est alors placée en redressement judiciaire, voire en liquidation judiciaire. Un liquidateur judiciaire est ensuite nommé afin de gérer la société, notamment pour procéder à la vérification des créances. À ce titre, il effectue également un contrôle des opérations réalisées (paiements, donations…) au cours de la période dite « suspecte », c’est-à-dire celle qui se situe entre la cessation des paiements et l’ouverture de la procédure collective. Dans ce cadre, certains actes considérés comme frauduleux peuvent être annulés. Une sanction dont un avocat a récemment fait les frais…
Dans cette affaire, une société qui, dans le cadre d’un litige, avait obtenu gain de cause en justice, avait encaissé les indemnités qui lui étaient dues à ce titre sur son compte détenu auprès de la CARPA. Elle avait ensuite donné l’autorisation à la CARPA d’émettre un chèque en faveur de l’avocat en règlement de ses honoraires. Mais après que la société avait été placée en liquidation judiciaire, le liquidateur avait réclamé à l’avocat le remboursement des honoraires ainsi perçus. En effet, ces honoraires avaient été réglés durant la période suspecte. Pour ce faire, le liquidateur avait exercé « une action en rapport » destinée à annuler le chèque émis par la CARPA et à demander le remboursement des sommes ainsi perçues par l’avocat.
Toutefois, l’avocat avait contesté la validité de cette action dans la mesure où le chèque avait été émis par la CARPA, et non par la société objet de la procédure collective.
Mais la Cour de cassation n’a pas retenu ce raisonnement. D’une part, elle a relevé que le chèque avait été émis au moyen de fonds déposés par la société, après autorisation de cette dernière. De sorte que le chèque constituait un paiement effectué par un tiers (la CARPA) pour le compte de la société débitrice. D’autre part, elle a constaté que l’avocat avait eu connaissance de l’état de cessation des paiements de la société. Dès lors, elle a estimé que le chèque émis en faveur de ce dernier pouvait bien faire l’objet d’une action en rapport exercée par le liquidateur.